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Publié par Milian

Oraison funèbre - Aricie

Lors des funérailles d'Aricie, Acamas, fils de Thésée et de Phèdre, s'avança devant les Athéniens et déclama le présent discours :

En ce jour où nous pleurons et prions le ciel qui pleure avec nous, je viens. Devant vous, fidèle peuple d'Athènes, je désire dire ces mots : Ô Aricie, toi qui n'es plus de ce monde mais du monde d'en-bas, celui sur lequel ruissellent nos larmes, celui dans lequel erre notre deuil, connais notre peine, notre détresse, notre supplice !

Autrefois, tu perdis tous tes frères. Le puissant Thésée, car c'était lui l'auteur de ce crime, te défendit de prétendre au trône d'Athènes et s'opposa à ton mariage, à ta possible descendance, ne voulant point connaître à nouveau les sanglantes rixes pour la couronne. Aujourd’hui, si tu eusses été là, tu n'aurais point souhaité voir nos visages abimés par la douleur. En effet, tu acceptais toujours ton destin, aussi funeste fût-il, et tu lui faisais face. Ô infortunée, née d'un mauvais sang, tu te trouvais malgré toi au milieu d'un conflit cruel, qui n'était point le tien. Alors, tu entrepris de te battre en défiant la vie avec bravoure et en résistant à la souffrance, pour saisir le bonheur où tu le pouvais trouver.

Si toi, vaillante femme, tu restais à Trézène, c'était dans le seul but de te trouver au plus près du prince de l'Attique, le fils de Thésée... Ton amour si pur et si profond pour Hippolyte te nourrissait de force, de rage et de courage. Avant même que les lois de l'hymen vous liât pour toujours, ton aimé chut au combat et jamais ne se releva. Cette nouvelle épreuve que t'envoyaient les Dieux fut pour toi d'une extrême violence que tu t'efforças de surmonter par tous les moyens, sans jamais céder à la désolation. Existe-t-il seulement une destinée plus sombre que la tienne ? Et pourtant ! Tu repeignais ta vie encore et encore, de nombreuses couleurs, pour que dans ton tableau ne s'immisce ni l'ombre, ni le sang, ni le désespoir.

Ton véritable combat est une leçon, un enseignement pour nous tous. Qui donc se pourrait dire assez fort, assez grand, assez puissant pour égaler Aricie et sa lutte infinie ? Aussi voudrais-je que nous retenions de ta vie l'héroïsme, car ton combat n'est nullement moins grand, nullement moins légitime que celui d'autres guerriers. Et que dans nos âmes, cet héroïsme soit à jamais lié au souvenir de la superbe Aricie.

 

 

Hippolyte et Aricie dans Hippolyte et Aricie, pièce de Jean-Philippe Rameau de 1733

(mise en scène d'Ivan Alexandre)

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