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Publié par i-voix

A lire :
un article très intéressant de Jean-Marie Gleize sur la « crise » de la poésie :

 

La poésie morte ou vive

 

  
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Jean-Marie Gleize rappelle d'abord combien la poésie apparaît aux yeux de beaucoup comme un genre littéraire mort. Sous le titre «Le Dégoût de la poésie»., Le Nouvel Observateur en 1987 écrivait ainsi : «Entre des enseignants qui font rabâcher aux enfants les récitations, des universitaires qui dissèquent les vers, et des poètes qui se réfugient dans l'hermétisme, les Français ont perdu le goût de la poésie. » En 1989, la revue le Débat constatait : «La poésie, en tant que telle, n'a plus la présence sociale et le rayonnement public qu'elle avait encore en France, par exemple, au lendemain de la guerre [...] La poésie vivante d'aujourd'hui paraît absente dans la culture la plus vivante d'aujourd'hui, ou n'avoir qu'une présence clandestine, une influence marginale."

   

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Jean-Marie Gleize analyse les causes de cet effacement de la poésie : anémie de la publication, carence de la critique, confidentialité de la diffusion, mais aussi sacralisation du genre par l'école : « une survalorisation idéologique de la poésie (et du Poète, et du «poétique» en soi) qui peut fort bien aller de pair (qui va de pair) avec une absence de fréquentation effective. Il faudrait pouvoir dire ceci, analogiquement : les Français non lecteurs de poésie sont croyants, mais non pratiquants. Et comme l'image scolaire qu'ils ont conservée de la poésie ne semble en aucun point correspondre à ce qui se présente à eux lorsque d'aventure ils tombent sur de la poésie réelle d'aujourd'hui, ils en déduisent fort logiquement que: 1) la poésie est une simple valeur abstraite (indépendante de sa réalisation), 2) la poésie appartient sans doute à un passé révolu (dont on peut conserver la nostalgie). »

 

Il souligne cependant qu'il est dans la nature même de la poésie d'être en marge de la société : comme l'écrivait le poète Jacques Dupin: «Absente, la poésie l'a toujours été. L'absence est son lieu, son séjour, son lot. Platon l'a chassée de la République. Elle n'y est jamais retournée. Elle n'a jamais eu droit de cité. Elle est dehors. Insurgée, dérangeante toujours, plongée dans un sommeil actif, une inaction belliqueuse, qui est son vrai travail dans la langue et dans le monde, envers et contre tous, un travail de transgression et de fondation de la langue.»

 

Jean-Marie Gleize décrit aussi des phénomènes récents qui ont tenté de redonner à la poésie une existence sociale : notamment la «poésie sonore» et le retour au lyrisme.

   

GLEIZE-Livre-lumiere1--Patrick-Sainton---Bernard-Plossu.jpgIllustrations extraites du livre D'où vient la lumière, encres de Patrick Sainton, photos de Bernard Plossu, texte de Jean-Marie Gleize, co-édité par le Musée Réattu à Arles, et Images en Manoeuvre éditions, Marseille, 2004
(Source images :
www.documentsdartistes.org)
 


Optimiste, il conclut à propos de la poésie :


« Sa vitalité (je reprends le topos à mon compte) et la richesse des oeuvres produites sont incontestables. Sa marginalisation sociale aussi. La stratégie du retour à un paradis perdu de la transparence, du bon sens musical ou prosodique a toutes chances de n'être qu'un spasme réactionnaire sans lendemain et, surtout, sans aucun effet salvateur (autre que très conjoncturel). La restauration du passé n'est porteuse d'aucun avenir, d'aucune solution.


Sur ce point, c'est en dehors de la poésie que pourrait se situer une lueur d'espoir : on peut imaginer une formation des lecteurs (à l'Ecole et/ou en dehors d'elle) aux différents langages contemporains (aux arts plastiques, à la musique, à la poésie). Pourquoi pas? Il n'est pas insensé de croire qu'on peut modifier une image, informer, enseigner, apprendre à lire. Il y faut du temps. Nous croyons savoir que la solitude n'est pas incompatible avec le fait d'écrire. C'est peut-être l'un des sens de l'affirmation d'Yves Bonnefoy : «La poésie est loin de sa demeure possible».

 

 

 

PROLONGEMENT HUMORISTIQUE :


 


Philippe Katerine : "Moi, je suis un poète et je vous emmerde..."

 

 

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