Interprétation - Marie Darsigny
Il y a des êtres qu'avant d'avoir vus, on a déjà oubliés
PURGER LES NÉONS
comme le titre d'une toune d'Arcade Fire
une prière pour les oubliés du trottoir
put your hands up in the air
if you want to be saved
Ce poème est extrait du recueil de poèmes Filles de Marie Darsigny et se trouve à la page 19. Pour interpréter ces vers, je me suis surtout concentrée sur l'expression "les oubliés du trottoir" qui m'a particulièrement marquée et que j'ai trouvée très belle. Je me suis donc demandée en premier lieu qui pouvaient être ces "oubliés". J'ai alors réfléchi à plusieurs hypothèses, mais ce que je trouve formidable avec cette expression c'est que les oubliés du trottoir peuvent être tout le monde et personne à la fois : Personne, parce que dans la vie quotidienne peu de gens ont le sentiment d'être oublié, on se pense tous bien entourés, une famille des amis etc mais au final dans certains moments de la vie nous sommes tous un peu abandonnés, il nous arrive de nous retrouver face à nous même de façon brutale. On peut d'abord penser aux sans-abris, ignorés de beaucoup de personnes, parfois endormis et disparus sous plusieurs cartons et couvertures, ce qui donne un sens assez tragique à la phrase. On peut également songer aux enfants laissés à un coin de rue par leur parents, perdus seuls au milieu d'une foule, qui agitent les bras et pleurent, attendant d'être retrouvé, d’où les vers suivants : "put your hands up in the air if you want to be saved" sans oublier les personnes à qui on a posé un lapin, encore une fois, sur une place, dans un parc, sur une avenue, ce sont des choses qui peuvent arriver, et à tout le monde. Ce poème fait aussi écho à de nombreux autres du recueil qui révèlent une réelle athazagoraphobie (= la peur d'être oublié, ignoré) de l'auteur comme le montre les vers "j'ai toujours peur qu'on m'oublie" page 40 ou encore "une vie entière à attendre d'être sauvée" page 44. Il me semble que ces deux vers issus de poèmes différents s'associent très bien au poème ci-dessus. Le choix d'avoir écrit les deux derniers vers en anglais produit comme l'effet d'un air de musique dans la tête, une chanson triste, un murmure répété en boucle à l'intérieur de notre crâne. C'est peut-être également un clin d’œil au début du poème "comme le titre d'une toune d'Arcade Fire" (toune = air de musique/chanson en québécois et Arcade Fire est un groupe de musique). Au fond, c'est un peu un poème moralisateur, il nous rappelle à la fois qu'il ne faut délaisser personne, faire attention à son entourage et que chaque individu à son importance, tout le monde mérite d'être sauvé.