Fulguration/association - Le Monde
Aujourd'hui, en lisant un article du supplément du monde spécialement consacré à l'abolition de la peine de mort, un extrait m'a frappée tellement il s'appliquait à L'Étranger.
L'article de Bruno Dethomas (26 janvier 1973), est titré :
Trois hebdomadaires poursuivis
Pour avoir relaté les derniers instants de Claude Buffet et de Roger Bontems, "Paris-Match", "L'Express" et "Spécial dernière" comparaissent devant le tribunal correctionnel de Paris
Ces journaux sont officiellement attaqués à propos de l'article 15 du code pénal : "(...) Aucune indication, aucun document relatifs à l'exécution autre que le procès-verbal ne pourront être publiés par la voie de la presse, à peine d'une amande de 360 F à 7200 F"
Extrait de l'article :
"(...) Maître Robert Badinter a montré l'interprétation restrictive qu'il fallait donner à une loi attentatoire à la liberté d'information, et il l'a définie en lisant la description insupportable - Oeuvre de Maître Naud - d'une "mise à mort".
S'interrogeant à son tour sur la raison des poursuites, l'avocat de L'Express, qui fut aussi celui de Bontems, l'a trouvée dans l'idée que si on guillotine des monstres on fait un acte de salubrité publique, alors que si on tue des hommes, la question se pose du bien-fondé de la peine capitale"
Extrait de L'Étranger (1942)p.153-155 :
" (...) le procureur s'est mis à parler de mon âme.
Il disait qu'il s'était penché sur elle, et qu'il n'avait rien trouvé, messieurs les jurés. Il disait qu'à la vérité, je n'en avais point, d'âme, et que rien d'humain, et pas un des principes moraux qui gardent le coeur des hommes ne m'était accessible. (...) Il a déclaré que je n'avais rien à faire avec une société dont je méconnaissais les règles les plus essentielles et que je ne pouvais pas en appeler à ce coeur humain dont j'ignorais les réactions élémentaires. "Je vous demande la tête de cette homme, a-t-il dit, et c'est le coeur léger que je vous la demande. Car s'il m'est arrivé au cours de ma déjà longue carrière de réclamer des peines capitales, jamais autant qu'aujourd'hui, je n'ai senti ce pénible devoir compensé, balancé, éclairé par la conscience d'un commandement impérieux et sacré et pas l'horreur que je ressens devant un visage d'homme où je ne lis rien que de monstrueux."