Incipit autobiographique - Ma mémoire & moi, conversation

   -   Alors ? Pas facile hein ? Par où tu vas la commencer ton autobiographie ?

-   Sûrement par aujourd’hui, et remonter le temps le plus loin possible. En tout cas, pas par ma naissance, tellement banal comme début. De toute façon je n’ai pas grand-chose à raconter à ce propos, la seule chose qui me vienne à l’esprit c’est qu’on a offert à ma mère un saucisson comme premier cadeau de félicitation. Super.

-   Ah… En effet, oublie.

-   Le problème c’est que je n’ai aucune idée de quels événements de ma vie choisir, qu’est-ce que je peux juger de plus important que le reste ? Il faut que je raconte 17 ans dans un livre, avec justesse en plus. Je me souviens de beaucoup trop de choses… C’est vrai que je pourrais résumer :
Ma maternelle à Paris avec ma meilleure amie Clara, la naissance de ma petite sœur,                 ma chambre jaune et bleue et la baignoire dans la cuisine.
Mon primaire dans la meilleure école du monde à la campagne, les nombreux déménagements, les vaches et les tracteurs.
Mon collège et lycée à Brest…

-   Et ?

-   Et le résumé ne convient plus, j’ai trop de détails en tête.

-   En fait ça te démange, tu voudrais tout raconter hein ?

-   Oui, il y a bien trop de souvenirs emmêlés dans ma tête pour pouvoir en ressortir juste quelques uns bien proprement, bien trop de choses et de gens qui me composent pour pouvoir ne parler que de moi.

-   Explique-toi, je t’écoute. Mais fait court.

-   Il y a ma mère, à qui je ressemble trait pour trait parait-il, il y a mon père, un espèce de vieux-enfant-artiste que j’admire discrètement, il y a ma sœur, source de jalousie et d’amour. Il y a les amis, il y a les oncles et tantes, cousins cousines, il y a Quentin. Il y a une multitude de rencontres, de voyages, de sensations, d’instants. Tu vois, la liste est longue.

-   Je vois. Mais pourquoi tu tiens tellement à écrire ton autobiographie ? C’est difficile, tu vois bien, et puis te connaissant ça sera surement raté.

-   Merci du soutien. D’accord, ça ne sera peut-être pas génial mais c’est une expérience à tenter. Je trouve agréable de fouiller dans sa mémoire pour en extraire des sons, des images, des pensées. Le plus dur reste de transmettre tout ça sur papier en trouvant les mots justes. Une fois le travail fini, je pourrai prendre du recul sur moi-même, voir ma vie de l’extérieur pour une fois.

-   Et tu ne peux pas faire comme tout le monde, « Bonjour, je vais vous raconter ma vie, blablabla » ? Tu te sens obligée de discuter pendant 3h ?

-   Tu crois que c’est simple de parler de sa vie privée à n’importe qui? Laisse-moi y réfléchir un peu avant au moins. Les premiers mots vont être difficiles à trouver. Ca me donne le vertige de me pencher au-dessus de ce vide que je vais devoir remplir avec ma propre vie. Certains y arrivent sans problème pourtant, mais pas moi. Pudeur ou timidité, voire incapacité. Un mélange surement. Là on est deux, c’est rassurant.

-   Tu choisis la facilité quoi. Trouillarde…

#L'autobiographie, #Incipit