Juste la fin de la pièce II, 4 par Fanny
Scène 4
ANTOINE. - Je t'ouvre mon cœur
et tout ce que tu trouves à faire,
c'est sourire ?
LA MÈRE. - Louis, réponds à ton frère, il a raison !
Je ne comprends plus pourquoi
pourquoi tu réagis comme ça ?
SUZANNE. - Qu'est ce qu'il y a Louis,
on ne veut pas te vexer,
on cherche juste à comprendre,
c'est tout.
ANTOINE. - Tu vois bien
qu'il est juste en train de se payer ma tête !
CATHERINE. - Antoine ! T'en as pas marre de tout ramener à toi,
pour une fois il sourit !
Je sais que, que je ne m'énerve jamais,
oui c'est vrai, je ne m'énerve jamais,
mais je ne supporte plus
de vous voir vous déchirer comme des enfants !
Parlez comme des adultes,
avec du du respect,
c'est ça, du respect.
LOUIS. - Maman, tu as raison,
c'était merveilleux ces dimanches,
ce sont de bons souvenirs pour moi...
Antoine, je ne comprends pas
pourquoi ça te dérange d'en parler,
n'était-ce pas merveilleux ?
ANTOINE. - Tu ne me comprends pas,
on se demande pourquoi,
à vrai dire c'est que sûrement tu n'as jamais cherché à comprendre
car quand on cherche bien,
on trouve.
LOUIS. - Je ne cherche pas à comprendre
mais je constate juste,
et je constate que t'évites le sujet,
que ceux qui sont pour moi les bons,
même les meilleurs souvenirs de mon enfance,
sont les pires pour toi.
Et pourtant des images qu'il me reste,
toi aussi, tu les aimais ces dimanches,
tu riais, on s'amusait
et maintenant quand on les évoque,
tu t'offenses, te braques.
ANTOINE. - C'est bon ? Monsieur je sais tout a fini
sa nostalgie sur les dimanches ?
Et si tu veux tout savoir
c'est peut-être parce que tu en fais partie
et que jusqu'à maintenant t'avais disparu
et que j'essaie de t'oublier
pour moins souffrir, mais tu t'en fous non, de nos états d'âmes ?
LOUIS. - Antoine, la seule chose que j'ai comprise,
c'est que tu as une grande rancœur contre moi,
je t'ai entendu ouvrir ton cœur, alors à mon tour.
Cette idée subite d'une visite
n'est qu'une conséquence d'une autre conséquence sur ma vie
qui a tout bouleversé...
LA MÈRE. - Louis, pleure pas, mon chéri, on est là,
le passé est derrière nous,
le principal est que tu sois là.
LOUIS. - Lorsque j'ai pris la route pour vous l'annoncer,
nombre de fois où j'ai eu ce doute ou non de le dire
par peur de vous faire plus de mal
que je ne vous en ai fait,
nombre de fois où j'ai essayé de vous l'annoncer
mais ce n'était jamais la bonne...
SUZANNE. - Ne t'en fais pas, cette fois-ci ça l'est
et on est avec toi, Louis.
CATHERINE. - Je pense que là, maintenant, il faut l'écouter
et le laisser parler
même s'il pleure et que ce qu'il a sur,
sur son cœur,
a l'air dur à dire.
LOUIS. - Je n'ai plus le choix,
et ça me fait mal de ne plus pouvoir tout contrôler
à cause de, de cette conséquence,
si brutale.
Et cette conséquence est que je suis malade
et que cette maladie est mon ennemie.
Et que cette ennemie
compte emporter avec elle, ma, ma vie.
SUZANNE. - Non, Louis, ce n'est pas possible,
pas maintenant, on vient de se retrouver,
dis-moi que c'est faux, que j'ai mal entendu, que j'ai rêvé,
Louis dis-moi, je t'en supplie !
LOUIS. - Je, je suis désolé, ne m'en veux pas, j'aurais aimé aussi.
LA MÈRE. - Non, je ne pourrais pas le supporter,
Louis, y a un moyen, j'en suis sûre, on va trouver une solution...
Louis secoue la tête, des larmes coulent le long de son visage désolé.
CATHERINE. - Louis, ce n'est pas de ta faute,
ne t'en veux surtout pas, tu n'y es pour rien.
LA MÈRE. - Non, pourquoi ? Pourquoi toi, mon fils ?
On venait à peine de se retrouver, que tu vas partir à tout jamais !
Tu es mon fils, je ne peux pas y croire !
SUZANNE. - Louis, es-tu vraiment venu nous voir, pour nous mettre dans cet état ?
C'est injuste, me faire culpabiliser alors que je ne te connaissais pas !
Une fois encore je devrai les ramasser tous à la petite cuillère
un à un.
C'en est trop pour moi, j'ai besoin de prendre l'air...
ANTOINE. - Louis... Je suis désolé pour toi, tu ne le méritais pas.
C'est moi qui paraît injuste avec toi,
tu m'as blessé en partant car je tenais à toi énormément
et c'est pour ça, tout mon comportement, mon irritation
lors des récits de souvenirs communs à nous deux.
C'est dur, cette foutue maladie qui débarque comme ça !
J'ai une question : si elle n'emportait pas la vie, serais-tu venu nous voir ?
LOUIS. - Ce serait mentir
que de dire
que la réponse ferme est non, je pense peut-être.
Même si je ne comprends pas ce sens de la famille que vous avez,
vous existez et on a un passé
commun
et vous oublier
même si j'ai tenté de croire que je l'avais réussi
est en réalité impossible.
ANTOINE. - J'accepte ta réponse mon, mon frère.
Je suis là maintenant.
Viens là, dans les bras de ton grand-frère !
Et pour Suzanne, tu ne peux pas la forcer à accepter ça.
LA MÈRE. - Promets-moi, Louis, de rester avec nous pour profiter de ces derniers moments
ensemble.
LOUIS. - Je te le promets, merci Maman.
Et toi, tu me promets de me laisser aller voir l'ancienne maison ?
LA MÈRE. - Si ça peut te faire plaisir, je suis d'accord.
CATHERINE. - Je, je suis heureuse de vous voir proches même si,
si Suzanne est furieuse
ça va passer, fin je l'espère.
En plus, Louis, tu pourras voir en vrai, cette fois-ci, nos enfants et même, même celui qui porte ton nom, ton filleul !
La pièce et le film adapté (qui m'a aidé à trouver l'identité des personnages, trop flous dans l'ouvrage), m'ont aidé à faire des choix qui tentent de se rapprocher au mieux de réelles réactions tout en s'inspirant de l'écriture de l'auteur. Également, le choix d'ajouter un peu de poésie dans ce drame familial tout en restant à la limite de l'expression naturelle, "de la vraie vie".
Alors, je me suis approprié les personnages, notamment Louis que j'aime beaucoup dans sa complexité, ses réactions inattendues mais très compréhensibles, ainsi que les autres personnages qui paraissent simples mais qui dans le contexte deviennent mêmes plus complexes que le personnage principal.
Par exemple, dans la lecture Catherine apparaît comme simple, et peu intéressante et j'ai voulu gommer cette impression en lui donnant l'image de celle qui est juste avec les autres contre-balançant avec la personnalité d'Antoine formant un équilibre dans le couple.
Je me suis mise dans la peau de chacun, m'imaginant face à ce drame en y ajoutant les caractères, les sensibilités de chacun.
Voici mon rajout, ma version de l'annonce imaginaire de Louis, que je me suis permise de nommer: “Jusqu’ici tout va bien”, une phrase tirée de l'introduction culte du film La Haine de Mathieu Kassovitz, qui correspond totalement à cette scène selon moi.
En écoutant cette introduction, j'avais l'impression d'être dans la tête de Louis durant sa visite.