Appréciation - Olivier Ertzscheid
Dans mes lectures « voix d’aujourd’hui », j’ai d’abord écrit que H Hache Hash était une explosion de bonne humeur et de couleurs, puis définit la poésie de Maram-al Masri comme le reflet de la guerre en Syrie avant de connaître Satori Express, autobiographie de Zeno Bianu qui rends hommage à des auteurs, des lieux ou des choses qu’il aime. Quelle diversité dans la sélection d’i-voix ! Et j’en ai encore le sentiment aujourd’hui.
En effet, le quatrième recueil que j’ai choisi, Classiques Connectés d’Olivier Ertzsheid est un recueil numérique sur le numérique et encore une fois, ce recueil m’a plu, car ce que je recherche dans la poésie c’est la surprise. Modifier des poèmes d’auteurs classiques comme Baudelaire ou La Fontaine, c’est assez surprenant. C’est aussi l’histoire du numérique qu’Olivier écrit, divisée en plusieurs chapitres, comme « Il était une fois le web » ; (chapitre 1) « Puis vinrent les algorithmes » ( chapitre 3) « Fleurirent les objets connectés » (chapitre 5). C’est un double défi que s’est lancé l'auteur : non seulement rendre l’informatique et le web poétique, un monde d’ordinaire associé aux sciences ; ici, il fait des « sciences poétiques », mais en plus le faire en reprenant des textes d’auteurs ayant vécu bien avant toutes ces technologies. Il faut pour cela garder la syntaxe et la structure du poème et changer des mots ou des bouts de phrases, qu’il met en italique pour rendre les modifications visibles. C’est en quelque sorte un article « substitution » géant. Olivier a finalement réussi ses deux défis, tout en nous faisant comprendre les dangers de ce monde connecté, auxquels nous ne sommes pas forcément sensibilisés, notamment la sorte de violation du domaine privé par les géants du net américains, abordé dans le chapitre 4 « Qui collectèrent nos données et nos profils ». Et dire que je suis en train de parler de poésie et de données informatiques dans une même phrase ! Une banalisation de la poésie qui peut faire penser à celle de Francis Ponge pour les objets ou à l’admiration de MLB pour la trousse de Camille. C’est pourquoi je vous recommande vivement la lecture ce de ce recueil, à la fois « sciences poétiques », hommage aux auteurs classiques et sensibilisation aux dangers du numérique.