Parcours Apollinaire - La musique par Helios
Ce tableau, Les Demoiselles d’Avignon, a été peint par Pablo Picasso. Il est considéré comme un des premiers tableaux cubistes. Avec le cubisme, Picasso rompt les canons de l'expression picturale et réinvente le troisième art. De plus, Picasso s'inspire ici de l'art africain : la femme nue ne représente pas l'érotisme comme en Europe mais la maternité.
Ce tableau résulte d'une année de présence dans une maison close catalane située rue d'Avignon à Barcelone, durant laquelle il a côtoyé quotidiennement de nombreuses filles de joie avec lesquelles il a tissé une certaine complicité. Contrairement à son apparence, ce tableau ne représente pas cinq femmes comme on pourrait le supposer, mais une seule et unique prostituée sous différents aspects, dans différentes postures. Cette composition n'est pas une juxtaposition d'ébauches sur le corps mais bel et bien une réalisation aboutie dans laquelle il joue avec la perception du public. D'ailleurs, le tableau ne s'intitule-t-il pas Les Demoiselles d'Avignon ? Pourtant, il n'y a qu'une seule femme et la scène se déroule à Barcelone.
Il m’a semblé intéressant de choisir cette œuvre dans le cadre de l’étude de la modernité poétique avec Guillaume Apollinaire car, en plus d’être de bons comparses, Apollinaire et Picasso avaient tous deux faim de nouveauté artistique et, tel Apollon avec sa cithare, ils savent que c’est grâce à leur vision de l’art, leur réinvention, que leurs gorges altérées seront arrosées d’ambroisie. Par conséquent, lorsque l’on lit chez Apollinaire des vers en prose qui n’appartiennent pas réellement à ce qui semble être une strophe, on voit avec les même yeux les visages et les corps des Demoiselles d’Avignon qui pourtant, n'appartiennent qu'à une seule femme.
Des cloches aux sons clairs clairs annonçaient ta naissance
Vois
L'amour lourd comme un ours privé
Dansa debout quand nous voulûmes
Et l'oiseau bleu perdit ses plumes
Et les mendiants leur Av
Un beau sermon à l'église
De longs discours après le banquet
Et de la musique
De la musique
Dans le recueil Alcools d’Apollinaire sont présents plusieurs thèmes et de manière générale, bien que ce ne soit pas le plus évident, le thème de la musique apparaît de manière récurrente. Ce thème apparaît parfois de deux manières différentes : de manière explicite, en évoquant la musique ; de manière implicite, en nous la faisant comprendre.
Dans un premier temps, la musique est exprimée clairement par Apollinaire. En effet, il l'évoque à plusieurs reprises, que ce soit à travers des instruments : « cymbales » dans Crépuscule, « harmonica » dans Colchiques, « cithares » dans La Maison des morts… ; à travers des mythes ou légendes : « Orphée » dans Poème lu au mariage d'André Salomon... ; à travers ce qui s'y rapporte : « chantent » dans La Blanche Neige, « dansant » dans Nuit rhénane du cycle de Rhénanes, « poètes » dans Les Sapins... ; ou tout simplement directement : « musique » dans La Maison des morts ou « fanfares » dans Les Sept Épées du cycle de La Chanson du mal-aimé. La musique est alors souvent rapportées au bonheur, à la joie bien qu'il y ait des exceptions comme dans I du cycle À la Santé avec « quelle voix sinistre ulule » qui ici chante le malheur d'Apollinaire de se retrouver en prison. Ainsi, on observe que la musique est évoquée dans la plupart des poèmes et se rapporte le plus souvent à la joie malgré quelques exceptions.
Cependant, la musique est également suggérée dans Alcools. En effet, Apollinaire bien souvent nous la suggère avec différents jeux d'écriture. On peut par exemple penser aux rimes qui sont présentes dans de nombreux poèmes comme dans Les Sept Épées ou encore Les Cloches du cycle Rhénanes. La musique peut aussi s'entendre dans les assonances. Prenons La Tzigane pour exemple, dans le premier quatrain il y a une assonance très marquée en [i] et dans le second quatrain en [ou]. Il y a également des allitérations comme dans Clotilde dans le premier quatrain en [l]. D'autre part, il y a aussi des homéotéleutes comme dans I du cycle À la Santé en [u]. Enfin, on peut observer un chiasme grammatical avec les sons [n] et [i] dans Chantre. Ainsi, avec tous ces procédés stylistiques, Apollinaire vient renforcer le thème de la musique.
On peut donc conclure que la musique est un thème essentiel du recueil Alcools car bien que ce thème ne soit pas central comme peut l'être l'amour, il est tout aussi important car, en plus de sa présence lexicale, la musique existe dans la forme de la poésie par le rythme et les sonorités de l'écriture, ce qui appuie son importance.
LECTURE A VOIX HAUTE :