Cas de conscience de Mme de Rênal par Fanny
Mme de Rênal prise de panique par la situation inconfortable qu'elle venait de vivre s'enferma dans sa chambre, et tenta de reprendre ses esprits en prenant un bout de papier à lettre et un stylo plume, transcrivit ses maux en mots afin trouver une issue.
L I - C. XIII
Un soir, Julien parlait avec action, il jouissait avec délices du plaisir de bien parler et à des femmes jeunes ; en gesticulant, il toucha la main de madame de Rênal qui était appuyée sur le dos d’une de ces chaises de bois peint que l’on place dans les jardins.
Cette main se retira bien vite ; mais Julien pensa qu’il était de son devoir d’obtenir que l’on ne retirât pas cette main quand il la touchait. L’idée d’un devoir à accomplir, et d’un ridicule ou plutôt d’un sentiment d’infériorité à encourir si l’on n’y parvenait pas, éloigna sur-le-champ tout plaisir de son cœur.
LA DRAGUE AU DOIGT
Je crois avoir bien compris ce qui vient de se passer, ce ne sont pas des rêveries, Julien m'a touché la main, oui le précepteur de mes enfants. Et je ne comprends pourquoi j'ai ressenti ce sentiment d'excitation mais de surprise également. Je ne saurais dire ce que cela signifie... Je me demande si ce ne fut qu'un geste étourdi ou un geste réfléchi, mais si cela est prouvé cela voudrait dire qu'il ressentirait quelque chose pour moi... Mais ne serait-ce pas juste une relation professionnelle avec une bonne entente ?
Cela n'est pas envisageable ; je le côtoie quotidiennement, dans mon intimité. Aimer est humain n'est-ce pas ? Oui, mais le problème n'est pas là, si ce n'était que de ça, je ne saurais dire le type d'amour que j'offre à ce jeune homme de dix ans de moins que moi... Ce que je comprends le moins, c'est que j'en ai fréquenté des hommes, des amis de mon mari, en ville, et je n'avais jamais ressenti un sentiment aussi troublant que plaisant ! Je me demande si je ne suis pas juste flattée d'être encore désirée par un jeune homme de dix ans de moins que moi, aussi intellectuel qu'il est... Ma réaction fut dictée non pas par mon cœur non mais par mon cerveau sans que je n'eusse mon mot à dire : retirer ma main aussi rapidement, une véritable erreur de mon cœur et un espoir pour mon esprit... Je doute que l'on puisse me l'interdire, en plus selon les récits que me conte Julien, l'amour interdit tourne à chaque fois au drame, autant éviter cela !
Ai-je bien dit l'amour ? Je suis confuse, mon cœur a parlé... Et mon mari, qu'en dois-je faire ? Je ne peux supporter la trahison que je lui fais, je me suis mariée devant Dieu ! Et julien est le précepteur de mes enfants, il a dix ans de moins que moi ! Mais aussi, mon mari consacre plus de temps à ses plans et en attendant je suis sa femme considérée à égale d'une plante verte... J'ai des sentiments et vivant constamment dans l'ignorance de mon mari sans la moindre ombre de romance je peux me le permettre non ?! Ne lui serait-ce pas déjà arrivé à lui ? Je ne peux en avoir le cœur net, même sur cela...
Choisir : je ne comprends pas cette nécessité de la vie de faire des choix, certains sont littéralement impossibles... alors, on en fait un, peu importe lequel, et on regrette après ? Je ne peux pas pour mes enfants, je ne veux pas m'approprier leur vie jusqu'à conquérir leur précepteur tellement il est bon envers eux, mon mari le prendrait comme une trahison, blesser Élisa en lui volant celui qu'elle convoite et puis son amour n'a pas été prouvé : il a dix ans de moins que moi, je ne veux pas risquer ma vie pour ce qui est pour lui un amour de jeunesse, une amourette...
Présentation - Ecritures d'appropriation Stendhal - i-voix
Julien Sorel : esthétiques et valeurs ? Œuvre intégrale : STENDHAL, Le Rouge et le Noir (1830) Parcours associé : Le personnage de roman : esthétiques et valeurs Tentatives de problématisatio...
http://i-voix.net/2021/05/presentation-ecritures-d-appropriation-stendhal.html