Cas de conscience de Mme de Rênal par Enora
Extrait qui précède situé dans le chapitre XXXV de la partie II (p 591 édition folio classique) :
"Julien entra dans l'église neuve de Verrières. Toutes les fenêtres hautes de l'édifice étaient voilées avec des rideaux cramoisis. Julien se trouva à quelques pas derrière le banc de madame de Rênal. Il lui sembla qu'elle priait avec ferveur. La vue de cette femme qu'il avait tant aimé fit trembler le bras de Julien d'une telle façon, qu'il ne put d'abord exécuter son dessein. Je ne le puis, se disait-il à lui même; physiquement, je ne le puis.
En ce moment, le jeune clerc qui servait la messe sonna pour l'élévation. Madame de Rênal baissa la tête qui un instant se trouva presque entièrement cachée par les plis de son châle. Julien ne la reconnaissait plus aussi bien; il tira sur elle un coup de pistolet et la manqua; il tira un second coup, elle tomba."
Cas de conscience de Madame de Rênal
Monologue intérieur de Madame de Rênal :
J'appris peu de temps après l'identité de celui qui a souhaité ma mort. J'ai d'abord pensé que cette personne a manqué d'habilité pour s'y être repris à deux fois. Quelle fut ma surprise lorsque l'on m'annonça qu'il s'agissait de Julien. J'étais confuse puis l'on me précisa son nom de famille. Hélas oui, le seul homme homme que j'ai aimé, Julien Sorel a pointé une arme sur moi et éprouvait assez de haine envers moi pour tirer. Peut être était-ce la lecture de ma lettre qui l'aurait perturbé ? Je ne peux le savoir. Pourquoi veut-il ma mort ? Nous nous aimons malgré tout. Je voudrais tant avoir la possibilité de lui parler, de comprendre son geste. Je pourrais lui rendre visite là où il séjourne en prison. En revanche, ça ne renverrait rien de bon à mon image. Pour avoir commis un tel crime, il sera durement jugé ; envoyé à la mort, pour sûr ! Oh non, qu'ils aient pitié de lui, je vous en prie. Le condamner serait me condamner à mon tour. Comment pourrais-je vivre sans sans le savoir en bonne santé et non loin de moi ? C'est impossible.