Selfie de poème - Le cours des choses n°28
La pollution autour de nous hurlait
nous faut-il rester enfermés
dormant
dehors des étalages
de chemisiers montés de masques à gaz
Pierre Vinclair, Le Cours des choses (poème n°28, page 97)
Je ne suis pas le poème le plus beau de ce recueil, ni le plus laid. Je suis un poème. Un poème assourdissant.
Ces vers portent sur la question du temps et de notre immobilisme. Ce poème donne à comprendre que la pollution qui nous entoure est bruyante, elle peut évoquer l'agitation du monde, des Hommes, la course après le temps, la richesse. Cette pollution hurlante transforme l'Homme, le modifie. Il y a l'enjeu d'un réveil face à l'endormissement, au refus de savoir et de demeurer aveugle sur ce qu'il se passe. Rester enfermés, dormir peuvent être une façon de se protéger du réel.
"La pollution autour de nous hurlait" est une personnification de la pollution qui se fait entendre. La suite du poème souligne une odeur insoutenable, irrespirable "qui nous traverse et que nous respirons", et nous savons que le souffle et la respiration ont une grande importance dans la tradition chinoise et le taoïsme.
Sommes-nous dans l'impossibilité d'agir, de changer Le Cours des choses. Est-il trop tard ? Nous produisons la pollution, nous sommes la pollution.
Cette sculpture d'Ousmane Sow comme selfie du poème montre un visage décharné, la décomposition, la chair atteinte. C'est une image dégradée, mais très humaine, elle est l'envers d'une image de moi modifiée, améliorée, virtuelle.