Scène enrichie - Acte II, scène 12
Une scène de Marivaux enrichie de didascalies, d’émoticônes et de SMS envoyés par les personnages via leurs smartphones...
SILVIA seule ; DORANTE, qui vient peu après.
Silvia.
Ah, que j’ai le cœur serré ! Je ne sais ce qui se mêle à l’embarras où je me trouve ; toute cette aventure-ci m’afflige : je me défie de tous les visages ; je ne suis contente de personne, je ne le suis pas de moi-même.
Dorante envoie un sms à son ami Edouard
Dorante, essoufflé
Ah ! je te cherchais, Lisette.
Silvia.
Ce n’était pas la peine de me trouver, car je te fuis, moi.
Dorante, l’empêchant de sortir.
Arrête donc, Lisette ; j’ai à te parler pour la dernière fois ; il s’agit d’une chose de conséquence qui regarde tes maîtres.
Silvia.
Va la dire à eux-mêmes ; je ne te vois jamais que tu ne me chagrines ; laisse moi.
Dorante, d'un ton désespérément triste
Je t’en offre autant ; mais écoute-moi, te dis-je ; tu vas voir les choses bien changer de face par ce que je te vais dire.
Silvia.
Eh bien, parle donc ; je t’écoute, puisqu’il est arrêté que ma complaisance pour toi sera éternelle.
Dorante.
Me promets-tu le secret ?
Silvia, avec un ton très suspicieux
Je n’ai jamais trahi personne.
Dorante.
Tu ne dois la confidence que je vais te faire, qu’à l’estime que j’ai pour toi.
Silvia.
Je le crois ; mais tâche de m’estimer sans me le dire, car cela sent le prétexte.
Dorante.
Tu te trompes, Lisette ; tu m’as promis le secret ; achevons. Tu m’as vu dans de grands mouvements ; je n’ai pu me défendre de t’aimer.
Silvia, en tournant le dos.
Nous y voilà ; je me défendrai bien de t’entendre, moi ; adieu.
Dorante.
Reste ; ce n’est plus Bourguignon qui te parle.
Silvia, suspicieusement.
Eh ! qui es-tu donc ?
Dorante.
Ah, Lisette ! C’est ici où tu vas juger des peines qu’a dû ressentir mon cœur.
Silvia, chuchotant d'une voix douce.
Ce n’est pas à ton cœur que je parle, c’est à toi.
Dorante.
Personne ne vient-il ?
Silvia, sur un ton très ferme.
Non.
Dorante.
L’état où sont toutes les choses me force à te le dire, je suis trop honnête homme pour n’en pas arrêter le cours.
Silvia.
Soit.
Dorante.
Sache que celui qui est avec ta maîtresse n’est pas ce qu’on pense.
Silvia, vivement.
Qui est-il donc ?
Dorante.
Un valet.
Silvia, après un temps de réflexion.
Après ?
Dorante.
C’est moi qui suis Dorante
Silvia, à part.
Ah ! je vois clair dans mon cœur.
Silvia envoie un sms à son amie Antoinette :