Journal de Louise Labé - 13 février 1555
Page du journal intime de Louise Labé
rédigée le jour de l'écriture de son sonnet 13
Combien de temps encor me faudra-t-il pour revoir mon cher amant ?
Oh, comme je me languis de son absence, comme il m'est douloureux d'endurer le vide qu'il laisse en moi à chacun de ses départs. Je n'en puis plus. Il me plairait tant de pouvoir m'abandonner à ses bras protecteurs, inlassable étreinte éternelle. Lyon n'est pour moi que grisaille sans sa présence et nul n'oserait souhaiter un éclat de soleil aussi lumineux que celui qu'il apporte à mon existence. Ni le tumulte des tempêtes, ni l'éclat soudain des orages ne pourront une fois même m'empêcher de le revoir.
Ces dernières lignes m'inspirent... peut-être vais-je écrire quelque vers ?
*****
Il m'aura fallu somme toute plusieurs heures pour coucher mes mots sur le papier et je ne cache point ma satisfaction après avoir clôturé ce poème. J'en suis, en outre, relativement fière...
Oh ! si j'étais en ce beau sein ravie
De celui pour lequel vais mourant ;
Si avec lui vivre le demeurant
De mes courts jours ne m'empêchait envie ;
Si m'accolant, me disait : Chère Amie,
Contentons-nous l'un l'autre, s'assurant
Que jà tempête, Euripe, ni courant,
Ne nous pourra déjoindre en notre vie ;
Si, de mes bras le tenant accolé,
Comme du lierre est l'arbre encerclé,
La mort venait, de mon aise envieuse,
Lors que souef plus il me baiserait,
Et mon esprit sur ses lèvres fuirait,
Bien je mourrais, plus que vivante, heureuse.
Si l'amour n'y est point perceptible, je souhaite qu'on m'exécute sur le champ. C'est comme si j'avais illustré la folle envie d'être aux côtés de mon cher et tendre de la manière la plus limpide qui soit. Et, afin d'éclairer au mieux le lyrisme de la chose, j'ai décidé de faire apparaître le thème de la mort. Au cours de ce sonnet, j'use à de nombreuses reprises du terme « Si » en début de vers, laissant présager quelque chute à la fin. Cela permet de mettre en exergue le vers final pour montrer combien je serais heureuse en la présence de mon bien-aimé quand bien même la mort viendrait me trouver. L'antithèse « Bien je mourrais plus que vivante » montre que la mort ne pourra en vain dissiper mon bonheur. J'ai également eu l'audace de mentionner la jalousie de la mort face à ma félicité.
La péroraison de ce sonnet présente une similitude déroutante avec celle de Douce Maîtresse, poème écrit par Pierre de Ronsard. Vois, tandis que j'écris « Bien je mourrais, plus que vivante, heureuse. », lui écrit « Heureux sera le jour que je mourrai d'amour ! ». Peut-être mon ami de la Pléiade sera-t-il flatté ?
Je me suis évertuée à approfondir un vers du sonnet IV qui me séduisait beaucoup.
Quelque penser de mort qui tout termine,
De rien mon cœur ardent ne s'étonna.
La volonté de faire apparaître la mort dans un poème lyrique en tant que thème principal me tourmentait, c'est pourquoi j'ai ce plaisir si orgueilleux d'avoir finalement achevé tel sonnet.
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