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Publié par Kathleen

 

    Le registre omniprésent dans le texte poétique Bec & ongles de Perrine Le Querrec est le registre polémique. 
 
    En effet, pendant tout le roman, elle s'adresse à nous, qui représentons le reste de l'humanité, et elle nous tutoie avec beaucoup d'insistance : "Tu ne te noies pas" ; "ta peau fragile" ; "ta bouche sensible" (p 9)  ; "T'en veux une ?" ; "Si tu me cherches, tu vas me trouver." (p 10) ; "Tu croyais" ; "ce que j'ai fait pour toi" (p 11) ; "Tu m'as bien regardée ?" (p 12) ; "Tu ne m'écoutes jamais." (p 14) ; "Tu vas voir" (p 17) ; "Tu aurais dû" (p 20) ; "Tu es la chair de ma chair." (p 25) ; "Te voilà" (p 28) ; "Tu as donné" (p 31) ; "Tu as perdu ta langue" (p 32) ; "Tu as l’œil" (p 33).
 
     Toujours dans cette insistance sur la deuxième personne du singulier, il y a à de nombreuses reprises des ordres autoritaires qui nous sont fait. De la première page : "Allez, vas-y" ; "Vis-le" ; "Crache-le" ; Va arracher" ; "Détache", à la dernière : "Donne ton point de vue" ; "Ne parle pas. Ne regarde pas. Ne bouge pas.", en passant par de nombreux autres moments : "Ne sors pas !" (p 10) ; "Tape-moi" ; "marre-toi" (p 11) ; "Remets-en" (p 13) ; "Déplie" (p 14) ; "Reste" ; "Retiens-moi" (p 15) ; "Achète" ; "Essuie-toi" ; "Redresse-toi" (p 16) ; "N'oublie pas" (p 17) ; etc. 
 
    La syntaxe n'est pas spécialement expressive mais les phrases sont empruntes d'une grande colère, d'une répulsion, et cela se ressent en partie par les nombreuses questions rhétoriques : "C'est ça que tu veux ?" (p 9) ; "Tu veux l'essayer ?" ; "C’est beau une humanité qui meurt, non ?" (p 11) ;"C'est encore loin la fin du monde ?"  (p 16) ; "Tu vois ce que tu as fait ?" (p 24) ; "Où regarder sans se blesser ?" (p 33). 
 
    Des jugements subjectifs dévalorisants sont également présents et semblent être crachés avec beaucoup de haine, de dédain : "cauchemar" (p 9) ; "supplice" (p 11) ; "puanteur" (p 12) ; "Analphabète, illettré, sauvage, barbare. Pauvre type." (p 13) ; "insupportables" (p 21) etc.
 
    Enfin il y a différentes figures d'insistances.
 
Des anaphores : "J'en perds mon français, j'en perds mes Français, j'en perds mes dents, j'en perds la tête" (p 1)
 
Des répétitions : "Des ébauches, une débauche d'ébauches." "Amour ? Peur. Air ? Peur. Nourriture ? Peur. Plaisirs ? Peur. L'autre ? Peur. Sortir ? Peur." (p 19)
 
Des énumérations : "Humiliée. Battue. Violée. Agressée. Trompée. Abandonnée. Voilée. Lapidée. Oubliée. Reniée. Injuriée. Ridiculisée. Bâillonnée. Effacée. Exploitée. Utilisée. Menacée." (p 13)
 
     Mais aussi des figures d'opposition, en particulier des antiphrases : "Animés / désaminés. Couverts. / Découverts. Mouvements / immobilités. Membrés. / Démembrés. Eparpillés/ regroupés. Dedans / dehors. Minuscules / gigantesques." (p 25) ; "Désapprenons, collectivement, individuellement." (p 22)
 
    Ce registre polémique vient renforcer l'effet de colère, de violence, d'agression, d'animosité que transmet l'intégralité de ce texte et permet à l'auteure de porter une critique et une opposition bien plus forte et percutante. De plus, les phrases sont courtes et s’enchaînent, ce qui donne une grande impression de sécheresse dans le ton employé.
Registre - Perrine Le Querrec
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