Images parlantes (par Gaia B)

Texte inventé à partir de cette photo prise par Marco Bruciati.
Quelle douleur! Qu'est-ce que je fais ici? Cette désolation me fait peur... Mais... Attends ! Il y a
quelqu’un qui est en train d'arriver! Aidez-moi, je vous en prie! Qui vous-êtes? Vous n'êtes pas
d'ici, n'est pas? Vous me semblez européen... Mais, puis-je avoir une réponse?
Non, ce n’est pas possible. Evidemment personne ne m’écoute.
Je n'arrive pas à comprendre rien, je n'arrive pas à raisonner. Vous êtes ici et vous ne me
Et maintenant? Qu'est-ce que vous faites avec ce sac noir? Qu'est-ce qu'il y a là-dedans?
Mais... Qu'est-ce qui c'est passé ici au centre culturel? Notre pauvre Amara détruit, toutes les
vitres cassées, la désolation à Suruc, on ne pourra plus parler de la reconstruction de Kobane.
Une larme? Est-ce que vous êtes en train de pleurer? Alors, vous savez ce qui s’est passé ici?
Le sac noir de nouveau. Ah, voilà c'est un appareil photo, et de dernière génération! Suis-je si
beau? Pourquoi cette multitude de photos? Est-ce lieu si intéressant?
Trop de questions, je suis peut être malade ou j'ai été frappé à la tête et je ne me rappelle plus
rien. Mais, alors, je ne comprends pas pourquoi vous , monsieur le photographe, vous ne me
Les terroristes ont frappé de nouveau... Kobane est perdue.
Notre centre culturel, le centre des espoirs pour la reconstruction, nos espoirs qui ont été
détruits avec lui par eux, c'est sûr.
Alors, si ça doit être comme ça, pardonnez-moi monsieur le photographe, vous avez raison
de ne me donner aucune réponse.
Pour vous et pour le monde entier maintenant je suis invisible.
Mais où sont les autres? Mes pauvres copains de discussion ont disparu comme moi.
Mon Dieu! C'est moi! Je n'avais pas vu ce placard rouge. Oui, c'est moi, mon nom, et les
autres! Tous morts dans un attentat le 20 Juillet 2015 lors d'une réunion. C'est cela que vous
êtes en train de regarder, n'est-ce pas monsieur le photographe?
Maintenant je comprends... Quelle situation!
Oui, regardez! Ici c'est moi : le deuxième à partir de gauche sur la ligne centrale.
C'est un si terrible spectacle de se voir mort, tué par la terreur, celle que nous devons toujours
supporter, qui nous ne permet pas de vivre dans l'état de paix que nous souhaitons.
C’est si étrange de comprendre ce qui s’est passé seulement après sa mort: c'est comme si je
n'avais pas voulu vivre ce terrible moment, lors duquel j'ai perdu la vie avec mes amis les plus
proches par ceux contre lesquels j'ai lutté pendant ma vie entière.
Vous pouvez comprendre que, en tout cas, ma pensée va aller à ma belle Jasmine qui doit
rester toute seule à se prendre soin de nos enfants qui, en manque d'eau, souffrent plus que
les autres gens du village dans le champ de réfugiés. Votre présence ici, monsieur le
photographe, me montre que, en tout cas, nous ne sommes pas morts pour rien. Les
terroristes veulent bloquer les espoirs de mon peuple, mais le Kurdistan, même s’il n'a pas
son propre territoire, il a une identité très forte et bien fondée qui lui permettra de continuer la
bataille pour son indépendance.
La lutte pour affirmer notre identité sociale et politique ne peut s'arrêter devant rien et les
kurdes ont besoin de tout l'aide possible.
Je crois qu’aussi le centre Amara pourra avoir sa renaissance. Notre peuple a été battu
plusieurs fois mais il n'est jamais mort et dans l'avenir je suis sûr qu'il pourra se montrer au monde entier sans aucune peur.