Courriel - Lettre de Tituba à Abena
Cette lettre a été écrite en lien avec un épisode au début du roman, Abena, la mère de Tituba, a été pendue pour avoir frappé un blanc avec deux coups de couteau.
Abena,
Tu es morte. Ils t'ont pendue. Et pourquoi ?! Parce que tu as touché un blanc. Tu ne l'as même pas tué, non. Tu lui as seulement, à peine, entaillé l'épaule. Tu ne faisais que te défendre, il allait te violer. Mais aucun de ces arguments n'a fonctionné. Tu es noire, il est blanc.
Mais qu'est-ce que cela change ?! Vous êtes deux êtres humains, enfants de la terre, de la nature, de l'eau, du ciel. Ou alors est-ce parce que tu es une femme ? Ô malheur, malheur d'être noire, malheur d'être une femme. Tu n'es coupable que de ça : être une femme noire. Mais la souffrance des uns fait le bonheur des autres. Cela ne révèle t-il pas l'inégalité qui règne sur terre ? Quels droits ont-ils sur nous ?! Ils peuvent nous voler, nous vendre, nous esclavager, nous violer, nous mutiler, nous pendre, nous tuer. Ce sont des crimes. Mais ce sont leurs droits. Qui est l’imbécile qui, un jour, décréta ceci ?!
Si les rôles étaient inversés, que crois-tu qu'ils feraient ? Mais ils se rebelleraient ! Ils tenteraient, en vain, de reprendre leurs droits, c'est un comportement parfaitement normal. Et nous n'avons pas ce droit. Crois-tu qu'un jour les noirs seront égaux aux blancs ? Qu'ils seront libres ? Cela me parait être une trop grande utopie. La plupart de nos rêves ne se réaliseront surement jamais. J'espère que celui sera l’exception qui confirme la règle.
Alors on a pendu ma mère, car un jour, elle blessa un blanc.
Au revoir maman.
Je t'aimais, et je t'aime toujours. Jamais je ne t'oublierai.
Tituba, ta fille