Kaléidoscope de voyage - Je reviendrai
Dans une rue, au cœur d'une ville de rêve
Ce sera comme quand on a déjà vécu :
Un instant à la fois très vague et très aigu
Ô ce soleil parmi la brume qui se lève !
Paul Verlaine, Jadis et Naguère, 1885
Ce serait des mains qui s'agitent au-delà des vitres
Des sacs rassemblés à la hâte
Une dernière étreinte et enfin, salvateur,
Le ronronnement du moteur qui démarre.
Ce serait une aire d'autoroute, il fait nuit
Une lumière rouge clignote au loin
Et cet instant magique, en une seconde,
Une heure qui disparait.
Ce serait un immense damier noir et blanc
La mer qui s'étend à perte de vue
Un frêle bateau de pêcheur qui semble
lutter contre les cargos à l'horizon
Et une tache de glace à la fraise.
Ce seraient des nuées d'objectifs, de flashes et de zooms
dans les mains de touristes venus du pays du Soleil levant
En face on prend la pose, on expose son plus beau sourire.
Tout ça pour une tour bancale.
Ce serait le vertige qui nous prend,
Devant l'immensité d'une mer de tuiles
Puis un dédale de ruelles fraîches et ombragées
Qui semblent jouer à nous perdre.
Ce serait une étreinte de pierre
Le regard qui se perd dans celui de l'autre
L'amour et la tendresse à l'épreuve de la mort
Prisonniers d'une vitre.
Ce seraient des instruments atroces,
Un frisson qui parcourt le corps à leur vue
Il fallait bien, pour se remettre,
La meilleure glace du monde.
Ce serait un immense édifice qui s'élance
Vers le ciel, une certaine idée de la perfection.
Et de beaux postérieurs rebondis,
En pierre, malheureusement.
Ce serait une ville que l'on ne verra pas.
Ce seront des perles salées qui rouleront
sur les joues, un dernier petit
selfie pour la route
Et la promesse de se revoir, à tout prix
Ce seront des images, des paysages
qui défilent dans le mauvais sens,
L'envie que le temps s'étire à l'infini,
Et une certitude : je reviendrai.